Dimanche 11 Mai

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Actualités parlementaires : narcotrafic, CHU en Guyane, précarité des étudiants ultramarins, essais nucléaires en Polynésie

Actualités parlementaires : narcotrafic, CHU en Guyane, précarité des étudiants ultramarins, essais nucléaires en Polynésie

Cette semaine, la reprise des travaux parlementaires a consacré l’adoption de la loi contre le narcotrafic. En parallèle, plusieurs sujets concernant les Outre-mer ont été évoqués lors des questions au gouvernement, tandis que la commission d’enquête sur les conséquences des essais nucléaires en Polynésie française a poursuivi ses auditions avec celle, notamment, de Sébastien Lecornu, ministre des Armées. 

Narcotrafic

La proposition de loi « visant à sortir la France du piège du narcotrafic » a été adoptée à 396 voix (68 voix contre, 34 abstentions). Les députés NFP ont unanimement voté contre. Les députés de Guyane, Jean-Victor Castor et Davy Rimane, du groupe Gauche démocrate et républicaine, ont également voté contre. Plusieurs élus ultramarins avaient jugé la proposition de loi insuffisante. Marie-Laure Phinéra-Horth, sénatrice RDPI de la Guyane et vice-présidente de la commission d’enquête sur le narcotrafic, avait confié au média La 1ère : « Pour moi, elle est incomplète dans la mesure où elle vise plus les têtes de réseau et pas forcément les consommateurs ».

Pour rappel, la loi prévoit notamment la création d’un parquet national anticriminalité organisée (Pnaco), une lutte plus efficace contre le blanchiment d’argent ou encore un régime carcéral plus strict. Une prolongation des gardes à vue pour les mules ayant ingéré des stupéfiants est également prévue, tout comme une peine complémentaire d’interdiction de trajets au départ ou à destination de certains ports et aéroports.

Questions au gouvernement : CHU en Guyane, précarité des étudiants ultramarins et coût de la vie en Outre-mer

Le CHU de Guyane

Lors des questions au gouvernement, mardi, le sénateur de la Guyane Georges Patient (RDPI) a interpellé le ministre de la Santé Yannick Neuder sur le projet de Centre hospitalier universitaire (CHU) de Guyane. Ce projet attendu depuis des années en Guyane vise à mieux répartir l’offre de soins sur le territoire et à former du personnel localement.

Le sénateur a évoqué les « conditions extrêmement difficiles » dans lesquelles se fait la création du CHU :

« Le centre hospitalier régional (CHR) qui le préfigure est dans une situation inquiétante. A cette date, point de directeur régional désigné, une situation financière préoccupante, déficitaire, avec une capacité de financement inexistante. Or, certains bâtiments de l’hôpital de Cayenne sont déjà dans un état de délabrement très avancé. Il faut donc engager absolument, et dès maintenant, un plan de reconstruction sans attendre la catastrophe qui ne manquera pas de se produire, liée à la croissance démographique du département.

Monsieur le ministre, quelles mesures concrètes et urgentes le gouvernement entend-t-il prendre pour garantir un financement à ce CHU à la hauteur des enjeux et une gestion adaptée au contexte de la Guyane ?

Qu’en est-il de la formation de cadres hospitaliers guyanais et tout particulièrement de la nomination de directeurs d’hôpitaux en Guyane ?

Dans sa réponse, le ministre de la Santé, Yannick Neuder, a évoqué l’avis favorable du Comité national de l’organisation sanitaire et sociale (CNOSS) à la labellisation du GCS-ES (établissement qui regroupe la plupart des activités des trois hôpitaux du territoire guyanais) en CHR (centre hospitalier régional), le 25 mars dernier. Une étape administrative primordiale pour signer la convention constitutive du CHU avec l’Université de Guyane, rappelle la Lettre pro de l’ARS.

Le ministre a par ailleurs souligné l’investissement de 108,8 millions d’euros et « un fonds de 34 millions pour les dépenses de fonctionnement ». Concernant le recrutement du directeur, le processus « est en cours. Un certain nombre de candidats sont auditionnés ». Enfin, le ministre qui « espère » se rendre prochainement sur le territoire a indiqué que « la Guyane bénéficiera de ses propres quotas pour le personnel hospitalo-universitaire, indispensable pour notamment la formation. »

« Les jeunes Ultramarins sont les grands oubliés de la République »

Lors de la même séance, Monique de Marco, sénatrice écologiste de la Gironde, a interpellé le ministre chargé de l’Education supérieur et de la Recherche, Philippe Baptiste, sur la précarité des étudiants ultramarins effectuant leurs études en Outre-mer, qui s’explique « notamment par un coût de vie plus important » et un « sous-investissement chronique dans les services publics, les CROUS et les cités universitaires ».

« Les jeunes Ultramarins sont les grands oubliés de la République, pourtant la seule réponse apportée par l’Etat est la mise en place d’un complément de bourse de 30 euros par mois. Pour la première fois, l’Etat reconnaît la nécessité d’une aide supplémentaire attribuée à ces étudiants mais cette aide est largement insuffisante et n’apporte aucune solution pour les non boursiers qui sont également victimes de ces inégalités territoriales.

Monsieur le ministre, comment comptez-vous lutter contre ces inégalités et développer l’offre universitaire locale, alors que les jeunes représentent un tiers de la population ultramarine ? » interroge la sénatrice.

Dans sa réponse, le ministre a souligné que la majoration des bourses de 30 euros pour 27 000 étudiants n’était pas « négligeable puisque cela représente jusqu’à 21% du montant de certaines bourses. Il y a ensuite la rénovation de 800 logements CROUS d’ici à 2027, c’est près d’un tiers du parc existant qui est en cours de rénovation. Par ailleurs, nous avons décidé de majorer la nouvelle aide à la restauration pour les jeunes qui n’ont pas accès à une offre du CROUS et plus de 4000 étudiants d’Outre-mer en bénéficient déjà ». Le ministre a indiqué ensuite que des moyens supplémentaires ont été accordés aux CROUS avec 1,7 millions en plus pour le CROUS Antilles-Guyane et 1,3 millions d’euros pour celui de La Réunion-Mayotte.

Dans la situation post-cyclone à Mayotte, Philippe Baptiste a ajouté que 300 euros ont été versés aux étudiants mahorais sur place et dans l’Hexagone et que 2 millions d’euros de crédit avaient été versés à l’université pour réaliser des travaux.

La vie chère

Dans une Assemblée nationale quasiment vide, François Ruffin, député écologiste de la Somme qui ne cache plus ses ambitions présidentielles pour 2027 et qui revient d’un voyage en Guadeloupe et en Martinique, a interpellé Manuel Valls, ministre des Outre-mer, sur la vie chère en Outre-mer.

Le député a interrogé le ministre sur la place qui sera laissée, dans le projet de loi contre la vie chère prévu d’ici à l’été, aux marges de la grande distribution, secteur bien peu concurrentiel dans les territoires d’Outre-mer. Manuel Valls absent, c’est François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l’Intérieur et éphémère ministre des Outre-mer entre septembre et décembre 2024, qui lui a répondu. « Le ministre des Outre-mer travaille à un plan de bataille complet et structurel qui s’attaque méthodiquement à tous les facteurs expliquant la cherté de la vie »

Les conséquences des essais nucléaires en Polynésie française

Cette semaine, la commission d’enquête sur les conséquences des essais nucléaires en Polynésie française a auditionné plusieurs ministres dont Sébastien Lecornu, ministre des Armées et par ailleurs ministre des Outre-mer entre 2020 et 2022.

Entre 1966 et 1996, la France a procédé à des essais nucléaires atmosphériques (46 officiellement) et souterrains (147 tirs officiellement) en Polynésie française, notamment sur les atolls de Moruroa et de Fangataufa, causant un « choc technologique, social, environnemental et sanitaire » sur le territoire, pour reprendre les mots du journaliste Tomas Statius, co-auteur d’une enquête sur le sujet.

Depuis janvier, une quarantaine d’auditions ont été menées et la rapporteuse Mereana Reid Arbelot (Gauche démocrate et républicaine), députée polynésienne et secrétaire de l’Assemblée nationale, devrait publier son rapport au mois de juin.

Ainsi, au cours des auditions où des aspects techniques sont discutés, des prises paroles plus libres, et plutôt savoureuses, ont cours.

Dans les discussions autour de ce dossier où se pose nécessairement la question de savoir ce que les autorités savaient de la dangerosité des expérimentations nucléaires pour la santé des populations, Dominique Voynet, députée écologiste du Doubs, vice-présidente de la commission d’enquête et ancienne ministre de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement entre 1997 et 2001, a ainsi vivement rétorqué à Sébastien Lecornu qui, quelques minutes auparavant, indiquait que la députée, en tant que ministre, avait eu connaissance de certains éléments du dossier.

« J’aurais bien aimé figurez-vous […] Je comprends maintenant à quel point on était dans le déni. Quand je dis on, c’est pas moi. Je posais des questions auxquelles je n’ai eu aucune réponse. Il y avait du déni, il y avait de l’obstruction, il y avait du mensonge. En permanence on invoquait le secret défense pour ne pas répondre […]

La deuxième chose qui m’a frappée, c’est que, au fond, un certain nombre de nos interlocuteurs évoquent en permanence « à l’époque on ne savait pas ». Et en fait si, à l’époque, on savait. On savait beaucoup de choses. L’ouverture des archives, le fait qu’avec le temps les langues se délient, nous ont permis de découvrir des éléments absolument choquants. Quand les militaires à Tureia [atoll concerné par des retombées radioactives, ndlr] se sont dotés de lugol [solution utilisée pour se protéger de la radioactivité, ndlr] et qu’on décide de ne pas en donner à la population alors qu’on sait qu’elle est exposée à la radioactivité, pour ne pas affoler le monde et ne pas générer de troubles sociaux, on sait. On se comporte mal et on le sait […] Tout ça sent quand même les pieds nickelés, la légèreté, le bricolage, l’improvisation. » (voir la vidéo à partir de 37’05)

Au cours de cette audition, on apprend également de la bouche de Sébastien Lecornu, qui ambitionne de devenir premier ministre, que les Outre-mer n’intéressent que très peu Paris. Extraits :

« Il y a un traitement des élites parisiennes vis-à-vis de l’Outre-mer que je trouve objectivement assez détestable. Tout le monde en dit du bien pour faire gentil, mais enfin, derrière, quand il faut vraiment rentrer dans le vif du sujet…[…] J’étais moi-même élu parlementaire dans une autre assemblée, au Sénat, mais quand on faisait les budgets des Outre-mer, globalement vous n’aviez que des députés ultramarins dans l’hémicycle en pleine nuit […]

On a dû gérer le Covid en Outre-mer en décalage avec les courbes dans l’Hexagone, dans une indifférence absolument épouvantable » s’épanche le ministre, qui indique un plus tard qu’il « écrirait » à ce sujet.

« J’étais sidéré du manque de réflexe Outre-mer dans l’administration centrale […] Je peux le dire maintenant mais il y avait un combat qui commençait vers 12h30, 13h, avant les questions au gouvernement, où dès qu’il y [avait] une question qui concern[ait] l’Outre-mer, le but du jeu des collègues consist[ait] à refourguer la question au ministre des Outre-mer (MOM), partant du principe que le MOM est ministre de tout aux Outre-mer. […] Cette déresponsabilisation interministérielle, elle est fondamentalement préoccupante. » (voir la vidéo à partir de 47′)

 

Photo de Une : Georges Patient interroge le ministre de la Santé, Yannick Neuder, sur le CHU de Guyane (capture d’écran site du Sénat)

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