Vendredi 26 Avril

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Davy Rimane : « L’évolution statutaire est une priorité »

Davy Rimane : « L’évolution statutaire est une priorité »
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Au dernier jour de la campagne électorale en Guyane, Guyaweb a rencontré Davy Rimane, le candidat soutenu par La France Insoumise et par le Parti Socialiste Guyanais, dans son fief, à Kourou. « Serein, déterminé à poursuivre la lutte » quel que soit le résultat du second tour des élections législatives samedi 18 juin, Davy Rimane qui a recueilli 21,31% des suffrages au premier tour se dit avant tout « volontaire pour défendre tout le monde » et mener « une politique en opposition à Emmanuel Macron. »

A l’heure où nous publions cet entretien, Davy Rimane est le seul des quatre candidats guyanais en lice pour la députation à avoir répondu à notre demande d’interview sollicitée depuis plusieurs jours. Nous y reviendrons ce jeudi, dernier jour de campagne du second tour des Législatives 2022.

Guyaweb : Vous avez reçu le soutien de Manuel Jean-Baptiste (12,10 % au 1er tour, arrivé 3ème) et de Christophe Yanuwana Pierre (11,14 %, arrivé 4ème). Comment analysez-vous ces prises de position et pensez-vous que les électeurs des deux anciens candidats les suivront en votant pour vous ?

Davy Rimane :« Ces deux soutiens, pour moi, sont dans la logique d’être en opposition à la politique d’Emmanuel Macron. Tout en sachant que le député sortant est issu de la majorité présidentielle. Et qu’il soutient la politique d’Emmanuel Macron. Avec les deux autres candidats, nous sommes sur la même ligne. Cela étant dit, les électeurs sont libres. Ils ont leur libre arbitre et décideront. C’est à moi de les convaincre. »

Lénaïck Adam bénéficie du soutien actif de Léon Bertrand dans sa campagne. En 2017, c’est pourtant vous que Léon Bertrand soutenait. Comment expliquez-vous ce revirement de l’ancien député-maire de Saint-Laurent ?

« Comme je l’ai dit, je respecte le choix de tout le monde. En 2017, le soutien de Léon Bertrand s’inscrivait dans une certaine temporalité. Nous sortions des mouvements sociaux. Aujourd’hui, il retourne dans sa famille politique, la droite, c’est logique. Léon Bertrand conserve une certaine aura mais quand on a exercé de telles responsabilités et qu’on a été condamné pendant l’exercice, ce n’est pas anodin. »

A peine un électeur sur quatre est allé voter au premier tour : que faire face à ce désengagement démocratique et quelle légitimité tire-t-on d’une élection massivement délaissée par les citoyens ?

« Pour lutter contre l’abstention, il faut arrêter d’utiliser les mots mais convaincre par des actes. Les gens n’y croient plus parce qu’il y a un trop grand décalage entre les paroles et les actes. Les actes politiques ne correspondent pas aux difficultés quotidiennes de la vie des gens. Il faut arrêter de parler et être dans l’action. »

En cinq ans, vous n’avez pas réussi à rallier les habitants de l’Ouest et surtout du Maroni – vous y recueillez à peine quelques voix. Comment expliquez-vous une scission aussi nette au sein de la deuxième circonscription ? Comment convaincre cet électorat ?

« Il ne s’agit pas de rallier les gens. Pendant cinq ans, j’ai laissé l’élu en place travailler. On n’est pas comme des mouches à tourner autour, c’était à lui de démontrer qu’il répond à la problématique des gens du fleuve. En l’occurrence, ça n’a pas marché. Je tiens surtout à écouter les gens et à voir ce qu’on peut faire ensemble. Je veux aussi m’indigner de ce qu’ils vivent et de ce qui n’est toujours pas fait. C’est ce que j’ai dit aux gens du fleuve. Je vois ce qu’il y a à faire, on doit changer ça ! »

Votre concurrent Lénaïck Adam affirme que vous ne connaissez pas la réalité des habitants du Maroni. Que lui répondez-vous ?

« Cela me fait sourire. Il connaît tellement la réalité des gens du fleuve qu’il a réussi à se les mettre à dos tout seul. On y va régulièrement. Je connais la réalité. »

La question de l’évolution statutaire a irrigué la quasi totalité des programmes des candidat-e-s et la campagne électorale. Quel statut prônez-vous pour la Guyane ? Et quelles sont selon vous les compétences qui devraient être transférées de Paris à Cayenne ?

« Demain, la priorité en tant qu’élu est de tomber d’accord sur le véhicule législatif pour une évolution statutaire. Toutes les questions de compétences transférées, partagées, gardées, seront tranchées entre les élus du territoire. Nous nous mettrons d’accord sur une stratégie. »

Les Accords de Guyane de 2017 prévoient le transfert de 250 000 hectares de foncier aux collectivités territoriales et 400 000 hectares aux peuples autochtones. Cinq ans après, cela n’a toujours pas été acté (voir Guyaweb du 25/03/2022). Comment comptez-vous agir pour débloquer le sujet ?

« Le député sortant se targue de dire que grâce à lui, c’est fait. Mais concrètement, non. Ce n’est pas le cas. Cinq ans après, cette question reste problématique. Pour moi, demain, il faudra que les choses se clarifient. Il y a des Accords de Guyane, il faut qu’ils soient appliqués ! Cette posture est claire, je l’ai toujours tenue et je le dirai de cette façon au gouvernement ! »

Le pouvoir d’achat sera certainement parmi les premières mesures sur lesquelles vous pourriez avoir à vous prononcer si vous êtes élu député. Que proposez-vous pour lutter contre la vie chère en Guyane ?

« On peut voir une certaine inégalité dans le fait qu’une partie de la population touche une prime de vie chère et une autre, non. Alors que tout le monde est concerné par la vie chère. Ce problème est surtout dû au transport et à l’enclavement de notre territoire. La première chose à faire est de mettre en place un fonds de compensation pour permettre à tout le monde de faire face aux prix très élevés. Il y a aussi la question de la différence de prix entre le littoral et les communes isolées. Pour le bâtiment, les prix sont exorbitants. Tant que la Guyane ne sera pas structurée, tant qu’elle sera enclavée, l’État devrait prendre en charge les coûts de transport. Ce n’est que de cette façon que nous pourrons avoir une économie productive. »

Quelle est votre position concernant l’immigration ?

« Le monde a été peuplé avec l’immigration, je ne la vois pas comme un problème. Seulement, nous ne sommes pas structurés pour accueillir dignement les personnes. Les bidonvilles, l’habitat illégal, tout cela génère des tensions dans la population. L’État doit donner les moyens financiers, matériels et humains aux collectivités afin qu’elles puissent accueillir dignement ces personnes et qu’elles ne soient plus dans la rue. »

Si vous êtes élu, où comptez-vous installer votre (ou vos) permanence(s) ? Comment allez-vous organiser vos allées et venues entre la Guyane et l’Assemblée nationale ?

« Nous sommes en discussion pour savoir exactement comment répartir nos permanences dans la circonscription, en particulier dans l’Ouest et dans la vallée de Maroni. Il y a Kourou aussi. Quand on regarde la circonscription on voit qu’il ne faut pas négliger Saint-Laurent. Nous verrons comment nous organiser pour que la population rencontre régulièrement son parlementaire. »

Combien de collaborateurs/trices parlementaires souhaitez-vous engager ? Pensez-vous déjà à certaines personnes pour rejoindre votre équipe ? Dans quel groupe parlementaire prévoyez-vous de siéger ?

« Nous n’avons pas encore défini cette partie du travail. Un député a droit à cinq collaborateurs maximum. Je siègerai au sein de la Nouvelle union populaire écologique et sociale (NUPES). »

En ce dernier jour de campagne, quel est votre état d’esprit ? Vous êtes confiant ?

« Je suis surtout serein. Quel que soit le résultat samedi, je continuerai la lutte, je continuerai le combat pour tout le monde, quelle que soit son origine. Je ne peux pas défendre seulement un groupe de personnes parce qu’ils sont nombreux. Je veux défendre tout le monde, même et surtout les minorités, même une seule personne ! Je continuerai, quoi qu’il arrive, parce que je suis comme ça ! »

Propos recueillis par Julien Sartre

Cinq ans après sa première tentative aux Législatives, le Kouroucien Davy Rimane, figure des mouvements sociaux de 2017 en Guyane, se retrouve une fois de plus face à Lénaïck Adam.

Dans une circonscription extrêmement étendue (54 000 km2) et contrastée (voir Guyaweb du 07/06/2022), le candidat peine à mobiliser l’électorat du fleuve, trusté en 2017 par Lénaïck Adam.

Si les résultats du 1er tour samedi dernier montrent que la popularité du député sortant s’est effritée sur cette partie du territoire, ce qui a profité à Jean-Philippe Dolor, originaire de Maripasoula, et à Manuel Jean-Baptiste, adjoint à la mairie de Saint-Laurent, la candidature de Davy Rimane, par ailleurs toujours plébiscitée sur le littoral (54,07% à Sinnamary, 52,76% à Macouria, 48,09% à Kourou et 33,22% à Montsinnery-Tonnegrande), ne semble toujours pas séduire sur les rives du Maroni. Pour preuve, c’est le seul candidat à n’avoir récolté aucune voix dans la commune de Grand-Santi (voir Guyaweb du 12/06/2022).

Reste à voir si les soutiens de Manuel Jean-Baptiste et Christophe Yanuwana Pierre, arrivés respectivement 3e et 4e au premier tour dans la seconde circonscription, permettront de rééquilibrer les rapports de force qui subsistent entre les électorats des deux candidats.

Par Philippine Orefice

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